Sexe et genre : l'épreuve de la raison
Daniel Ducharme | Société | 2024-05-15
Ce matin, l'animateur de la radio du matin à Radio-Canada a déploré qu'il n'y ait pas de case permettant aux personnes non genrées de s'identifier sur certains documents officiels, comme le permis de conduire du Québec, par exemple. Il a tenu ses propos comme si ça allait de soi, sans porter attention au fait que, sur les permis de conduire, il est fait mention du sexe des personnes, et non de leur genre. Encore une démonstration de la confusion que plusieurs personnes font entre le sexe biologique et le genre. Est-il besoin de rappeler que le mot anglais gender ne signifie pas genre en français ? Et qu'un mot de genre féminin ne signifie pas qu'il s'applique nécessairement à une pesonne de sexe féminin, comme sentinelle, par exemple ? Bon, il vaut peut-être mieux de ne pas s'aventurer sur ce terrain.
Tenons-nous au fait. Comme vous le savez, il y a deux sexes, un par personne (à l'exception de certaines personnes qui en revendiquent deux, mais il s'agit d'un cas sur un million), et non pas trois ou quatre. En revanche, il peut y avoir plusieurs genres, une bonne vingtaine si j'en crois la communauté LGBTQ+, le "plus" laissant la porte ouverte à d'autres possibilités de genre. Écoutons à ce propos le philosophe français Dany-Robert Dufour :
Pour le dire autrement, il faut distinguer le sexe et le genre. Le sexe est biologique et relève du réel, et le fait que les êtres humains doivent se débrouiller comme ils peuvent avec cette donnée, qui ne leur convient pas toujours, cela s’appelle le genre. Lequel n’est pas une donnée réelle, mais une construction psycho-sociologico-discursivo-culturelle, qui relève de l’imaginaire et du symbolique.
Je suppose que l'animateur de radio aurait pu perdre son emploi s'il avait osé dire publiquement qu'il n'y avait que deux sexes, tout comme un savant du 15e siècle pouvait se retrouver sur le banc de l'Inquisition s'il prétendait que la terre était ronde. Cet animateur a sans doute raison de protéger ses arrières car, depuis la pandémie, il n'aurait pas été le premier à perdre son emploi dans les médias, surtout ceux qui sont financés par l'État. N'empêche que ça demeure un journaliste, pas le premier quidam venu, et on serait en droit de s'attendre à un peu plus de rigueur de sa part.
Personnellement, je ne suis pas opposé à ce que les autorités fassent mention, en plus du sexe, du genre d'une personne et ce, pour satisfaire les demandes de ceux qui estiment important d'inscrire ce type d'information sur un document officiel. À la limite, j'accepterais volontiers qu'on s'enligne sur l'administration fédérale qui a pris l'habitude d'ajouter une case "autre" en dessous des sexes. Mais je vais toujours considérer comme une épreuve à la raison de considérer que les êtres humains peuvent avoir plus de deux sexes. À mon humble avis, prétendre qu'il y a plus de deux sexes est du même ordre que prétendre que la Terre est plate, et non pas ronde. Cela contrevient aux lois scientifiques démontrées depuis de nombreuses années. En cela, je rejoins Dany Dufour quand il écrit :
J’en déduis qu’on n’a plus le droit de dire qu’il existe deux sexes dans une grande université et qu’avec la déferlante woke nous nous rapprochons de l’entrée des terraplanistes et autres créationnistes à l’université.
Bref, admettre qu'il existerait plusieurs sexes biologiques constitue une épreuve à la raison. Je ne peux souscrire à cette hypothèse frivole. En revanche, je n'ai rien contre les genres, et j'éprouve de la compassion pour ceux qui souffrent en raison de leur identité de genre. Je suis une vieille personne, certes, mais je suis ouvert aux multiples possibilités offertes aux individus de vivre une sexualité satisfaisante, même si je comprends mal le besoin d'afficher publiquement ses préférences en matière de relations intimes. Après tout, la discrétion demeure une qualité, non ? Bon, il vaut peut-être mieux que je m'arrête ici pour aujourd'hui...
Référence : Dany-Robert Dufour. Le phénomène trans : le regard d'un philosophe. Paris, Le Cherche-Midi, 2023